Par Thomas Hervé Mboa Nkoudou
La difficulté d’accès à l’équipement est souvent pointée comme l’un des principaux problèmes dont souffrent les makerspaces en Afrique. Et pourtant, le secteur informel regorge d’acteurs locaux capables de surmonter cette difficulté et permettre ainsi aux makerspaces d’acquérir des équipements à moindre coût. Au Sénégal, j’ai rencontré l’un de ses acteurs locaux capable de fabriquer de nombreux équipements largement utilisés dans les Makerspaces à travers le monde (imprimantes 3D, CNC … ). Il s’agit du jeune Demba Diop.
Une parfaite symbiose entre qualité, low-cost et local
J’ai surtout été impressionné par la puissante et robuste imprimante 3D « Darky » conçue et fabriquée par Demba Diop. La « Darky » est capable d’imprimer des objets d’une qualité supérieure à celle de nombreuses imprimantes 3D commercialisées et dont le coût va souvent au-delà des 2500 $.
Au regard de la qualité d’impression de la « Darky », sa robustesse, la facilité à la dépanner localement, et son coût de moins de 450 $, j’ai décidé d’en commander une pour le Mboalab. Cependant, une grande question me troublait : vu le nombre de personnes et d’organisations désireuses d’embrasser la mode de l’impression 3D au Sénégal, pourquoi la « Darky » n’est-elle pas largement utilisée ?
Les défis de la propriété intellectuelle et de la promotion du secteur informel
Une première réponse est venue en discutant avec Demba Diop, l’inventeur de la « Darky ». Pour lui, le problème de la commercialisation de son imprimante 3D est dû d’une part, au fait qu’il y ait beaucoup de règles à respecter pour obtenir une accréditation. D’autre part, les personnes travaillant dans le secteur informel ne bénéficient pas du soutien nécessaire en matière de propriété intellectuelle ; par conséquent, il ne sait pas comment protéger son invention.
Une deuxième réponse est venue de la Sonatel, une grande entreprise de télécommunications d’Afrique de l’Ouest, qui souhaite installer un Fablab à Dakar. En discutant avec certains responsables, ils m’ont fait comprendre qu’ils prévoyaient de commander de nombreuses imprimantes 3D en Europe. Je leur ai demandé pourquoi, puisqu’il y a un Sénégalais ici à Dakar qui fait de très bonnes imprimantes 3D. Ils ont été très surpris (agréablement) de l’entendre et ont déploré le fait qu’il n’y ait pas assez de communication autour de la « Darky ». Je leur ai conseillé de rencontrer Demba Diop et de lui commander des imprimantes 3D, pour l’encourager et soutenir le secteur informel.
Soutenir le secteur informel, c’est booster l’innovation locale
Ces deux réponses nous montrent que ce qui se passe dans le secteur informel doit être suffisamment documenté et exposé à la société grâce à une bonne communication. Par ailleurs, les makerspaces d’Afrique doivent soutenir le secteur informel en utilisant des équipements fabriqués localement (Imprimante 3D, CNC, …).Cette collaboration permettrait de booster le développement par l’innovation technologique.